Naomi Gallay

Derrière ces visages en mouvement et ces aplats de couleurs, se cache un commentaire sur l’égalité raciale. Il joue de l’ambigüité des jeux d’ombres pour faire cohabiter plusieurs nuances de peau sur un corps commun. Les teintes se mêlent et se fondent à la lumière ambiante offrant à la peinture figurative l’occasion de flirter avec l’abstraction.

Sa pratique artistique s’inscrit à la fois dans une démarche intuitive et une démarche consciente. Elle pose un regard onirique sur notre société occidentale contemporaine et se matérialise sous la forme de personnages témoins d’une hybridité culturelle harmonieuse. Elle parle alors de portrait inclusif qui prend le parti de réunir, afin de représenter une seule et même race, celle qui ne fait aucune distinction et qui met sur pied d’égalité chaque individu, la race humaine.

Son travail invite plus qu’il ne dénonce. Il invite à l’observation, à la contemplation et à la réflexion. Il expose une problématique sociale au travers de scènes, où les personnages au teint hybride vivent cette symbiose de manière sereine. Plutôt qu’être une critique de nos travers, à savoir le ra- cisme, l’inégalité, ou la crainte de la différence, il s’agit d’une ode à la cohésion naturelle possible qui surgit dans la différence, afin de démontrer l’égalité par la complémentarité et l’unité.

Le cadrage offre à l’abstraction une marge de liberté et d’imagination, tout en créant une proximité avec les personnages en mouvement.

Naomi Gallay (1993) est une jeune artiste et designer suisse issue d’une famille de cinq générations dans les arts graphiques. Elle obtient un Bachelor of Arts en Communication visuelle – Design graphique à l’ECAL, puis développe son regard artistique en Californie au sein d’un studio de design. De retour en Suisse, elle reçoit le Prix Jean Knechtli, destiné à un artiste de moins de 30 ans. Après avoir attiré l’attention de Louis Vuitton, son travail artistique a été exposé en Suisse et en Californie.

Website: naomigallay.com Instagram: @naomigallay
Tous droits réservés © Naomi Gallay

Jessica Russ

Originaire de Nyon, Jessica Russ (08.08.88) démarre sa formation en Arts Visuels à l’ECAL en 2008. Elle poursuit sa formation en effectuant un master à la HEAD, où elle se consacre à la peinture uniquement. En 2019, le Service de la Culture de la ville de Lausanne lui octroie un atelier dans les anciennes écuries du parc de Mon Repos.
Cette même année, elle reçoit le prix Alice Bailly ainsi que le prix de la ville de Nyon.

Elle participe à de multiples expositions comme « Dojo, Temple de l’abstraction » au Commun, à l’invitation du collectif Éclair ou « Bruits de fond », organisée à la Villa Bernasconi par le peintre Luc Andrié. Elle expose à HIT, la Placette, la Ferme de la Chapelle ou encore au CHUV, sa dernière exposition en solo.

Son site : https://jessicaruss.ch

Tous droits réservés @ Jessica Russ

Climat de violence (nom au féminin)

ANGELA MARZULLO

sous la pluie plus d’ardeur

plus de brutalité plus de frénésie plus de fureur
plus de furie
plus de force
plus d’impétuosité plus de virulence plus de puissance plus de véhémence

sous la brume plus de contestation

plus d’émeute
plus d’indignation plus d’insoumission plus d’insubordination plus d’insurrection plus de jacquerie
plus de mutinerie plus de rébellion
plus de révolution

sous la bise plus d’arrogance

plus d’effronterie plus de grossièreté plus de hauteur
plus d’incongruité plus d’incorrection plus d’insolence
plus d’impertinence plus d’impolitesse plus de morgue
plus d’outrecuidance plus de suffisance plus de superbe

sous la neige plus de fièvre

plus de fureur


cold wave*
*Appellation «cold wave» est surtout utilisée en France, en Belgique et Suisse francophones.

Genève,
2015


Suzanne Dracius

ATTERRÉE EN PLEINE ASCENSION

Atterrée, en pleine Ascension, que l’on ait pu à la fois parvenir, à une même époque, à un si haut degré d’intelligence artificielle et, dans le même temps, descendre à un tel niveau d’imbécillité virtuelle ou de réelle stupidité, se hisser jusqu’au nec plus ultra du raffinement citadin et en même temps massacrer si sauvagement la nature, atteindre un summum de sophistication avec téléphones et tablettes et sombrer dans les pires abîmes de barbarie, ulcérée que l’on puisse développer autant de moyens de lutte contre le mal, la maladie, et s’abaisser à un tel point de vilenie, de mauvaiseté, concomitamment, s’organiser si efficacement pour combattre la misère et affamer pareillement la terre, horrifiée que l’on puisse être arrivé à un tel degré de technologie, envoyer des fusées dans l’espace, des satellites, et en être arrivé là, en être là, descendre si bas dans l’obscurantisme, se prosterner, se prostrer, se mettre à quatre pattes, se vautrer dans l’archaïsme, l’ignorance et l’ignominie, projeter de retourner marcher sur la lune et en même temps fouler aux pieds les droits de l’Homme, piétiner les droits de la Femme, fabriquer des armes de destruction massive, danser sur le ventre du voisin ou de l’ennemi lointain et interdire l’avortement même en cas de viol, simultanément stimuler au maximum le savoir, porter au sommet l’instruction et se fabriquer des croyances préhistoriques, accroître la connaissance et se façonner des fois immondes, faire preuve d’autant d’humanisme et de bêtise à la fois, donnant libre cours à ses instincts animaux les plus inhumains; épouvantée que l’humain, capable d’une si magistrale lucidité, d’analyses aussi poussées, soit en proie à une telle folie, qu’en mesure de maîtriser quasiment l’universel, l’homme se laisse aller à une pareille démesure et à tant de mesquinerie ; écœurée que les hommes puissent à la fois parcourir les océans et naufrager dans le pire repliement sur soi, exaspérée par toutes ces contradictions et l’incohérence du monde.

Port-Royal, Jeudi de l’Ascension

Des tissus noirs

Adrien Savigny


Crêpe de laine

Comme un fleuve aux larges méandres,
Dont le courant lourd et régulier entraine tout sur son passage, Le regard sombre dans son sillage compacte et mélancolique.

Sergé de soie

Indifférent, il se déploie glacé et glissant , Insensible aux yeux tendus vers ses stries luisantes, Sa surface se casse pour mieux happer le regard.

Satin de soie

Effleurant sa surface scintillante du bout des doigts,
Il glisse et frémit comme une feuille dans le vent d’automne,
Avec gaieté et insouciance, délicatement se pose sur le ciel gris d’octobre.

Crêpe Marocain

Ondoyant comme une dune du Sahara,
Il déploie sa surface granuleuse et sensible, Dense et souple, il se glisse autour des doigts.

Tweed de laine

Dans ses ramages s’enchevêtrent les contours flous d’une matière moelleuse, A sa forme nébuleuse s’accroche la chaleur d’un été lointain,
Au coeur de l’hiver,

Velours de soie

Il coule sur le corps en un mouvement doux,
Son fin duvet flamboyant, avide de lumière,
Une caresse chatoyante et éphémère sur la peau frémissante.

Lin irlandais

Gonflé par le vent et fouetté par l’embrun des vagues,
Reposant sur la rosée du matin,
Bouffant et mouvant sous un ciel nuageux.